dimanche 12 avril 2009

Premières rencontres avec Naruto

Ma première rencontre avec Naruto a été décevante. Je me souviens d'un combats de personnes juchées sur d' énormes animaux : un crapaud, une limace, un serpent. L'anime n'a pas retenu mon attention. Une seconde rencontre a été plus marquante : des adolescents combattent dans une arène circulaire. Au sol, un tapis herbeux clairsemé. Je suis très impressionné par la puissance des coups échangés, et les marques que laissent les jeunes ninja dans le sol.

C'est à partir de ce moment que j'ai commencé à m'intéresser l'histoire de Naruto Uzumaki. Je suis allé de surprise en surprise. Non seulement, l'anime et le manga me rappelaient les super-héros de mon enfance, mais j'y trouvais mis en images des éléments de psychologie individuelle : des traumatismes précoces, leurs élaborations, des dynamiques de groupes, des histoires transgénérationnelles.

Je découvrais également qu'avec certains de mes patients,  Naruto pouvait servir d'intermédiaire. Par exemple, sur le chemin qui le mène de la salle d'attente à mon bureau, un enfant fait le jutsu d'invocation de Gamabunta. Je lui fais remarquer qu'invoquer une créature aussi puissante pour un rendez-vous laisse  imaginer qu'il le juge assez dangereux. Il nie le danger, mais un lien entre le thérapeute et l'enfant est créé. Il permettra de parler de pouvoirs extraordinaires, d'invocations interdites et autorisées et de la difficulté de leur étude. Naruto servira ici de médiateur et permettra à l'enfant de parler métaphoriquement au thérapeute de ses difficultés d'apprentissages. 

Un autre enfant fera sa psychothérapie en bande dessinée en s'appuyant sur le symbiote de Spiderman  puis sur Dragon Ball puis enfin sur Naruto Uzumaki dont je découvrirai qu'il est un expert extraordinaire. Rien ne lui échappe, ni les bagues de l'Akatsuki, ni le nombre de queues du démon renard, ni les techniques complexes de Shikamaru. C'est d'ailleurs à ce dernier qu'il s'identifie : il vit dans un monde ou, pense-t-il, toute difficulté peut être résolue grâce à la force de la pensée pure.

Certains enfants ne peuvent pas faire usage de la métaphore. Ils sont davantage intéressés par les pouvoirs extraordinaires de Naruto. Il faut dire que le manga est de ce point de vue d'une grande richesse. Manipulation des éléments, invocation de créatures, changements de formes, contrôle du corps ou de l'esprit de l'autre... il semble qu'aucun fantasme ni aucune angoisse n'échappe à l'imagination de l'auteur.

Chacun, bien évidement, a son personnage préféré. Et bien évidement, ce choix est profondément lié à des positions inconscientes. Le type de pouvoir, sa forme, ses effets sur les autres et sur soi, la primauté donnée à l'attaque ou à la défense, parlent à chacun des parler des liens imaginaires et inconscients qui le relient aux autres et à soi.

Tout Naruto semble être une extraordinaire machine à raconter les voies de subjectivation dans leurs réussites comme dans leurs échecs. C'est là une invitation qui semble être faite pour un psychanalyste.